Commentaires Résumé
2009/2 Menschenrechte in Schweizer Informations­einrichtungen

Le Fonds de l’Union internationale de secours aux enfants (UISE/UIPE), 1919–1985

Commentaires Résumé

Les archives de l’Union internationale de secours aux enfants (UISE/UIPE) constituent un fonds clos d’origine privée de près de 100 mètres linéaires, actuellement conservé aux Archives d’Etat de Genève (annexe Terrassière).

L’Union crée la force ...

L’Union internationale de secours aux enfants est fondée à Genève le 6 janvier 1920 par Eglantyne Jebb, également fondatrice avec sa sœur du Save Children Fund à Londres, et le Comité suisse de secours aux enfants, sous le patronage du CICR. Son but: unir les efforts des associations de divers pays qui cherchent à porter secours aux enfants victimes de la guerre et de ses conséquences, sans distinction d’appartenance religieuse ou politique. Dès sa création, les mouvements analogues d’autres pays se rallient à l’UISE, notamment le Föreningen Rädda Bärnen créé à Stockholm en novembre 1919 et le Comité de secours aux enfants de l’Europe, qui deviendra le Comité français de secours aux enfants, fondé à Paris le 1er décembre 1919.

Secours d’urgence: un élan de solidarité internationale sans précédent 

L’appel des Eglises et le 1er Congrès des œuvres de secours aux enfants des pays éprouvés par la guerre, tenu à Genève en février 1920, contribuent à l’essor de l’Union qui joua un rôle discret de médiatrice. L’aide aux enfants victimes de conflits armés suscite un intérêt général sans précédent, amenant les représentants des pays belligérants à surmonter leurs préjugés nationaux et à s’asseoir autour d’une table pour négocier. En décembre 1920, Giuseppe Motta, alors président de la Confédération helvétique et membre du comité d’honneur de l’Union, invite la Société des Nations (SDN) à s’associer à l’action de l’UISE. Il propose de nommer un Haut commissaire, en la personne du Dr Nansen, chargé de s’occuper de la question du secours aux enfants touchés par la famine en Russie. L’Union sera également très active en 1935 lors de la guerre en Abyssinie, dès octobre 1936 pendant la guerre civile espagnole ou encore de 1942 à 1943 lors de la famine en Grèce. Elle ne ménagera pas ses efforts durant la Seconde Guerre mondiale et plus particulièrement en 1945.

L’aide au développement et les droits de l’enfant 

Après des années d’activité, la nécessité d’un travail en profondeur apparaît comme une évidence pour l’UISE. Parallèlement aux secours d’urgence, il s’agit de mener une action permanente auprès de pays en difficulté économique. Sur le plan international, l’Union s’attache à promouvoir l’aide au développement, et élabore une poli- tique cohérente de protection de l’enfance. Elle collabore avec diverses organisations internationales pour mener à bien ces projets. Ils se concrétisent notamment avec l’adoption de la Déclaration de Genève ou Déclaration des droits de l’enfant, le 26 septembre 1924, par la SDN, qui associe l’Union au Comité de protection de l’enfance de 1924 à 1936, puis à la Commission consultative des questions sociales de 1937 à 1942. Le 20 septembre 1946, l’UISE fusionne avec l’Association internationale de protection de l’enfance (AIPE) et devient l’UIPE, l’Union internationale de protection de l’enfance. Cette nouvelle organisation internationale non gouvernementale est dotée du statut consultatif auprès de l’ONU et de ses organismes spécialisés, tels que l’UNICEF et le Conseil économique et social. Ses tâches: faire connaître les principes de la Déclaration des droits de l’enfant, élever le niveau de la protection de l’enfance et contribuer au développement moral et physique de l’enfant.

Elle organise congrès, séminaires et conférences, collabore avec d’autres organisations à des enquêtes internationales et des études, et crée des commissions d’experts (p. ex. Commission consultative de l’enfance délinquante et socialement inadaptée).

L’UIPE gère également un service de parrainage d’enfants, élabore des projets d’aide et de coopération technique et organise des réunions régionales pour faciliter l’échange d’expériences entre les organisations des pays, principalement en Afrique et en Amérique latine.

Les circonstances particulières d’un versement aux Archives cantonales genevoises 

L’affaire qui éclate en 1981 et qui est relatée dans la presse comme «l’affaire de l’UIPE» n’est pas étrangère au versement qui aura lieu en 1986 aux Archives d’Etat de Genève. Au début des années 1980, l’Union internationale de protection de l’enfance connaît de graves difficultés financières qui mettent sérieusement en péril ses activités. Les instances décisionnaires font appel à l’ancien conseiller d’Etat, Jean Babel, pour prendre la présidence et remettre de l’ordre dans les comptes. En 1985, ce dernier est forcé d’annoncer la dissolution de l’association, n’ayant pas réussi à éponger une dette de près de 3 millions de francs, conséquence d’une mauvaise gestion financière et de projets trop ambitieux. L’affaire se termine devant les tribunaux où l’ancienne direction et ses membres sont les principaux inculpés; ils seront d’ailleurs entendus pour la première fois par le juge d’instruction en 1986.

Peu de temps après cette dissolution, votée le 19 mars 1986 par le Conseil général, un ancien responsable de projets sur le terrain prend contact avec les Archives d’Etat. Il souhaite éviter la destruction de plusieurs milliers de documents relatifs aux actions humanitaires mises en œuvre sur le plan international lors de catastrophes ou de conflits. Le souci de préserver des pièces à conviction en un lieu sécurisé est aussi déterminant, car l’enquête du juge d’instruction est en cours. C’est dans ces circonstances particulières que les Archives d’Etat sont amenées à se prononcer rapidement sur le sort final de documents produits durant près de soixante-cinq années d’activité et conservés dans deux caves du quartier de Varembé (Genève). Une visite des dépôts provisoires, organisée le 11 avril 1986, permet de déterminer les séries susceptibles d’être intéressantes pour la recherche historique et d’évaluer le travail qui devra être entrepris pour rendre ce fonds accessible au public. En effet, les documents ne sont ni triés, ni classés (beaucoup de doublets) et les archives sont incomplètes; beaucoup de pièces ont été détruites, notamment celles concernant la correspondance et la comptabilité antérieures à 1975 ainsi que celles relatives à des dossiers de projets sur le terrain. Finalement, c’est près d’une centaine de mètres linéaires qui est versée sous forme de don, fin avril 1986, dans les dépôts de l’annexe des Archives d’Etat (Terrassière). Seules les pièces comptables des dix dernières années d’activité restent la propriété de l’association pour des raisons légales. Pour l’anecdote, le 4 mai 1990, les anciens employés de l’UIPE et leur avocat, ainsi que le juge d’instruction en charge du dossier, se sont rendus aux Archives d’Etat pour emprunter trois classeurs nécessaires à l’audience prévue au Tribunal le jour même; ces documents n’ont d’ailleurs toujours pas été restitués aux Archives.

Instrument de recherche et communication 

Devenu propriété des Archives d’Etat, le fonds produit par le Secrétariat de l’UISE/UIPE basé à Genève sera conservé tel quel jusque dans les années 1990 où débuta son traitement archivistique. L’élaboration d’un instrument de recherche pour les historiens n’a pas été une mince affaire, car un important travail préalable de recensement, de tri et de reconditionnement a été nécessaire. L’inventaire est pourtant sur le point d’être achevé et le fonds porte la cote Archives privées 92; il est partiellement disponible via la base de consultation des Archives d’Etat à l’adresse suivante: www.ge.ch/archives, base de données Adhémar.

Parmi les grandes séries, on trouve les procès-verbaux des réunions du Comité exécutif et du Conseil général, en leur qualité d’organes décisionnaires; les dossiers du Secrétariat, qui retracent les activités de l’Union, du Comité exécutif et du Conseil général; ils sont classés chronologiquement et concernent la fondation de l’UISE, l’organisation des secours, les relations avec les autres associations, les comptes rendus financiers, les rapports d’activité des sections, les congrès, les études, etc. On trouve également les dossiers des différentes commissions et sections de l’UISE, dont la Commission pour l’enfance d’origine non européenne ou la Commission consultative de l’UIPE pour les pays asiatiques. A cela s’ajoute une série imposante de dossiers d’opérations, classés par continent et par pays, d’environ 50 mètres linéaires. Ils traitent des relations avec les associations membres, les autorités, l’organisation des secours, etc. La partie concernant l’Europe (1919–1973), l’Amérique du Nord (1932–1981) et l’Amérique latine (1919–1985) est achevée; restent à inventorier les dossiers de l’Afrique et de l’Asie.

Pour terminer cet aperçu, on retiendra encore la série de dossiers d’organisations internationales (classés alphabétiquement) et ceux concernant l’ONU, qui permettent de retracer la participation de l’UISE au Comité de protection de l’enfance de la SDN (1924–1936), puis à la Commission consultative des questions sociales (1937–1942); la série des dossiers classés par matières, telles que le droit des enfants, les journées mondiales de l’enfance, l’adoption, les réfugiés; les diverses publications, notamment le Bulletin de l’UISE devenu la Revue internationale de l’enfant, font l’objet d’une série distincte. A noter que le centre de documentation et la bibliothèque de l’UIPE ont été vendus à un institut italien, faute d’avoir pu trouver un repreneur en Suisse. Le fonds compte également une collection de photographie classées par pays, des dossiers concernant la crise financière et la déconfiture de l’UIPE, des dossiers du personnel et quelques dossiers administratifs, qui tous restent à traiter.

Mise en valeur du fonds et potentialités de recherche 

Les archives de l’Union internationale de secours aux enfants constituent un fonds important pour qui souhaite aborder les problématiques liées au processus de reconnaissance et d’intégration de l’enfance. Par exemple, dans le cadre des politiques actuelles mises en place par les gouvernements ou dans le contexte particulier de l’Europe des années 1950 en pleine reconstruction et confrontée à son passé colonial. En un siècle, l’émergence de l’aide à l’enfance a connu de nombreux bouleversements, tant au niveau des thèmes abordés que des méthodes d’action envisagées. Ces documents portent sur plus de soixante-cinq ans d’activité dans le domaine de l’enfance (1919–1985), laissant aux historiens un vaste champ d’étude à défricher. Les pistes sont nombreuses: la définition de la place de l’enfant dans la société, la question d’une institutionnalisation de la protection de l’enfance et le rôle joué par l’UISE de 1924 à 1936 au sein du Comité de protection de l’enfance de la SDN, la mise en place d’une politique internationale de protection de l’enfance au travers de textes comme celui de la Déclaration de Genève ou encore la place de l’enfant dans le droit international au XXe siècle (législation spécifique). Actuellement, seuls les thèmes suivants ont fait l’objet d’une étude: l’activité de la Commission chargée de l’enfance non européenne, les films humanitaires réalisés à l’époque de la collaboration entre le CICR et l’UISE, l’activité du Comité français de secours aux enfants (membre de l’UIPE) pendant la Seconde Guerre mondiale ou encore la guerre d’Espagne. Dès lors, les potentialités de recherche d’un fonds comme celui de l’Union internationale de secours aux enfants (UISE/UIPE) sont encore multiples.

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Nathalie Fanac Huguenin-Elie

Archiviste, Archives d’Etat de Genève.

Résumé

Das Archiv der internationalen Kinderhilfe befindet sich im Genfer Staatsarchiv. Die Organisation wurde 1920 gegründet und widmete sich unter anderem der Bekanntmachung der Rechte der Kinder und der Verbesserung der Verhältnisse der Kinder durch konkrete Hilfsmassnahmen. Nach dem Zweiten Weltkrieg schloss sie sich mit einer Vereinigung mit ähnlich gelagerten Zielsetzungen zusammen und engagierte sich für den Aufbau ähnlicher Organisationen in den Ländern Afrikas und Südamerikas. Die schlechte Verwaltung der Finanzen und zu ambitiöse Projekte führten zu einer starken Verschuldung, die trotz der Übernahme der Verbandsführung durch Jean Babel mit der Auflösung der Organisation im Jahre 1986 endete. Der Archivbestand setzt sich aus den Protokollen und Fotografien der Organisation von ihren Anfängen bis zu ihrer Auflösung zusammen. Einzelne Bestände des Archivs waren bereits Gegenstand von Publikationen, vieles wartet aber noch seiner Auswertung.