Kommentare Abstract
2020/ Abbild und Inszenierung der Gesellschaft

Où et comment peut-on consulter les archives maçonniques en Suisse ?

Kommentare Abstract

Les institutions maçonniques dans le monde sont des associations privées à but non lucratif, dont l’existence est assurée par les cotisations de leurs membres. Tous les documents qu’elles émettent sont donc à caractère privé et leur consultation requiert l’autorisation exprès de l’institution.

Ces institutions, que l’on appelle obédiences et qui portent généralement le titre soit de Grand Orient soit de Grande Loge sont plusieurs par pays (une demi-douzaine en Suisse) et regroupent chacune sous leur juridiction (constitutions et règlements statutaires) un nombre parfois considérable de Loges bénéficiant elles-mêmes d’une large, voire totale indépendance, concernant notamment la gestion de leur patrimoine. A titre indicatif, la plus grande et plus ancienne obédience de Suisse, la Grande Loge Suisse Alpina (GLSA), qui a été fondée en 1844, ne compte pas moins de 83 Loges. Or, la GLSA n’abrite pas les archives de ses 83 Loges, celles-ci étant seules responsables de leur patrimoine. En revanche, la GLSA archive tous les documents concernant ses relations avec ses Loges ainsi qu’avec d’autres institutions maçonniques extérieures. Elle a profité du déménagement récent de son siège de Lausanne à Berne pour faire trier et classer ses archives de manière professionnelle.

Il est clair que les archives les plus abondantes se trouvent dans les Loges les plus anciennes, qui datent d’avant 1844. Certaines remontent à la seconde moitié du XVIIIe siècle. Mais d’une manière générale, les archives des Loges répondent aux mêmes séries ou types de documents.

Logesud Parc Des Musées M Cugnet 2008

Que trouve-t-on dans les archives d'une loge ?

A la Loge L’Amitié de La Chaux-de-Fonds, par exemple, nous avons le « Livre matricule » dans lequel est enregistré le nouveau membre dès son admission, ainsi que les diverses étapes de sa progression maçonnique au sein de la Loge.

Un dossier lui est également ouvert (type dossier suspendu) dans lequel sont déposés les différents documents le concernant (demande d’admission et documents d’accompagnement, planches – conférences d’élévation aux différents degrés maçonniques, etc.). Cela concerne les données personnelles de chaque membre.

Enfin, les registres ou classeurs des différents « procès-verbaux » concernant les décisions et la vie de la Loge. Ces registres sont classés par ordre chronologique et concernent tout ce qui intéresse à la fois la vie administrative, sociale et rituelle de la Loge. Là sont contenues les informations les plus générales, concernant la vie associative commune à toute société humaine, mais aussi les plus discrètes, relatives à tout ce qui a trait à l’initiation des membres, à leurs activités maçonniques, à leur élévation ou, parfois, hélas, à leur expulsion de la Loge (ce qui est quand même extrêmement rare).

Il existe également des dossiers spécifiquement administratifs qui concernent, par exemple, la comptabilité de la Loge : cotisations, frais d’entretien de l’immeuble (quand celui-ci appartient à la Loge), etc. Sont généralement séparés les dons et dépenses destinés à la bienfaisance etc.

L’ensemble est assez vaste, mais il ressort de cela que les éléments les plus sensibles sur le plan de la discrétion sont évidemment les procès-verbaux qui concernent la vie sociale et  « rituelle » de la Loge.

Consultation d'archives maçonniques conservées par des institutions publiques

Dans le cas d’un partenariat de la Loge avec une institution publique de conservation, la diffusion de ces archives doit être réglementée avec particulièrement de précision. Dans le cas du partenariat de la Loge « La Bonne Harmonie » de Neuchâtel avec la Bibliothèque publique et universitaire (BPUN), certains dossiers délicats ne peuvent pas être consultés, par exemple, sans l’accord préalable du Vénérable Maître de la Loge (le Président) et de son Collège (les membres de la direction collégiale de la Loge).

En ce qui concerne les rituels proprement dits d’une Loge (textes qui président aux cérémonies maçonniques au Temple), la question ne se pose même pas, car les rituels sont systématiquement protégés de toute diffusion extérieure à la Franc-maçonnerie. Non pas qu’il y ait en eux des « choses » à cacher, mais parce que le rituel étant considéré comme le pilier immuable de toute cérémonie maçonnique, il ne peut être divulgué sans risque d’être déformé et de perdre ainsi des éléments symboliques clés, qui constituent le fondement même de l’ordre maçonnique et de sa pérennité.

Au vu de ce qui précède, on peut se rendre compte que la transmission par une Loge maçonnique de ses archives à une institution publique de conservation n’est pas évidente et que certaines conditions restrictives de diffusion doivent être convenues au préalable. On peut aussi discuter de la valeur relative que pourrait avoir un document maçonnique aux yeux des membres de la Loge par rapport à la vision qu’en ont des profanes membres de l’institution de conservation concernée. Il y a au sein des Loges une sensibilité envers certains documents, peut-être largement exagérée par rapport à celle que ressentiraient des professionnels aguerris de la conservation…

Michel Cugnet

Michel Cugnet

Franc-maçon, ancien Vénérable (président) de la Loge L’Amitié de La Chaux-de-Fonds.

Abstract

Les institutions maçonniques sont des associations privées à but non lucratif. Les documents qu’elles émettent sont donc à caractère privé et leur consultation requiert l’autorisation exprès de l’institution. Dans le cas d’un partenariat d’une Loge avec une institution publique de conservation, la diffusion des archives doit être réglementée avec précision. Certains dossiers délicats ne pouvant pas être consultés sans l’accord préalable du Président et de la direction collégiale de la Loge.