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2008/2 Die Wirtschaft der neuen Medien

«La différenciation des systèmes va s’installer durablement»

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Interview de Josefa Haas, directrice du Medieninstitut, Zurich

arbido: Le web, Open Access, les actualités sur simple clic de souris, tout semble possible rapidement et à moindres frais avec les nouvelles technologies. Au point que les aspects qualité et investissement en temps semblent être devenus secondaires!

Josefa Haas: Nous vivons en effet actuellement une période d’euphorie. Tout est gratuit via le web et son expansion semble ne connaître aucune limite. Or, on oublie que l’investissement en temps a un prix et que la fourniture de contenus doit donc être rémunérée d’une manière ou d’une autre. Si vous me permettez une analogie, cet accès illimité et quasi immédiat à une multitude d’informations dans tous les domaines est un peu ce que le fast-food est à la gastronomie. On distingue ici entre le «quick and dirty», ou le tout-venant, et le «premium», qui implique tout un travail tant au niveau de la forme que du contenu et, donc de la qualité.

Vous suggérez qu’il y a une différenciation des systèmes: d’une part, l’information gratuite (pour les utilisateurs) financée uniquement par la publicité et, d’autre part, l’information qui implique créativité et travail intellectuel qui, elle, doit être rémunérée?

Malgré la tendance actuelle qui submerge littéralement le marché de l’information en ligne, tout n’est effectivement pas dit: on commence à prendre conscience que la tendance «fast-food» en matière d’information cache beaucoup de pièges et donc beaucoup de responsabilités. Or, la communication publique doit être caractérisée par la transparence et celle-ci implique notamment un sérieux travail sur les sources. Un autre aspect qu’il ne faut pas oublier ici sont les invariants «humains» comme le goût pour la qualité des prestations, quelles qu’elles soient. Ce ne sont donc pas seulement les technologies modernes, en l’occurrence le Web, qui dictent les comportements des consommateurs. La différenciation des systèmes va à mon avis s’installer durablement, mais toujours en fonction des besoins, qui sont aussi multiples que divers.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples de cette différenciation en cours?

Je ferai cette fois un parallèle avec la presse écrite gratuite et les journaux classiques qui vont au-delà des «hard news» et qui proposent des éclairages spécifiques, des commentaires et des propositions de lecture. On constate le même phénomène sur internet où l’on perçoit une nette tendance à la revalorisation des essais, à la mise en ligne d’articles de fond, bref, à une véritable production intellectuelle.

Mais qui dit revalorisation de la créativité dit aussi rémunération: comment donc financer le niveau «premium»?

Le rôle de «story teller» et de «sense maker» est fondamental dans ce contexte. Il figure parmi les tâches primordiales indispensables à toute société. La responsabilité morale des médias est fortement engagée au vu de la tendance aux informations de type «quick and dirty». D’où l’importance de défendre le droit d’auteur: dans quel contexte et sous quelles conditions son travail doit-il être accessible? Par quel biais son travail doit-il être valorisé? Nous revenons ici, comme toujours, à l’importance de la marque, de la référence «qualité». On s’aperçoit que de plus en plus d’usagers du web sont disposés à payer pour avoir accès à ce type de prestations. Mais ils ne sont pas les seuls, les universités réagissent elles aussi et refusent des citations de textes tirées du web! Or, les références reconnues peuvent proposer une exclusivité qui mérite justement un salaire. Ce sont finalement les lecteurs qui décident s’ils veulent des offres financées par la publicité, par des subventions ou par leurs propres dépenses. Ils doivent se rendre compte que la source du financement a un impact important sur les contenus.

Interview menée par Stéphane Gillioz, rédaction arbido

Contact: josefa.haas@medieninstitut.ch